Nous le connaissions comme un talentueux chanteur de salsa, le voici en spectaculaire chanteur de tango. Car le grand Ruben Blades s’est vu remettre un Latin Grammy Award il y a quelques mois pour le meilleur album de tango de l’année 2014, qui s’intitule tout simplement « Tangos ».
Aujourd’hui âgé de 66 ans, Ruben Blades a grandi au Panama dans une famille de musiciens. Avec des origines colombiennes du côté de son père, cubaines du côté de sa mère et espagnoles du côté de ses grands-parents, cela n’est pas étonnant que son univers musical allait être très savoureux ! Et pourtant, il a d’abord baigné dans la culture américaine du rock ‘n’ roll avant de s’intéresser de près à la salsa…
Ruben Blades est étudiant en droit et en sciences politiques lorsque le Panama connait de graves émeutes politiques. Il part alors pour New York où il fait de très belles rencontres : Richie Ray, Bobby Cruz, Joe Cuba. Mais c’est le producteur de Cheo Feliciano, Pancho Crystal, qui lui offre la possibilité d’enregistrer son premier disque, « From Panama to New York », en 1970. Plus tard, Roberto Roena le recommande pour travailler à la Fania. Le seul poste à pourvoir est au courrier, mais c’est là une énorme opportunité de se rapprocher des grandes stars de la scène musicale new yorkaise du moment ! Roberto Roena, qui voit en lui un avenir prometteur, conseille à Ray Barretto de lui faire passer une audition lorsque celui-ci cherche à remplacer le chanteur de son orchestre.
En 1975, Ruben Blades est un des chanteurs principaux de l’album « Barretto ». Il chante aussi cette même année avec la Fania All Stars. L’année suivante, il part remplacer Hector Lavoe dans l’orchestre de Willie Colon.
Ruben Blades a toujours été très engagé politiquement, et les albums « Metiendo Mano » (1977) et surtout « Siembra » (1978) évoquent les questions sociales du moment. Le titre « Pedro Navaja » issu de cet album est un pur bijou avec un sacré message social. Il relate la triste vie d’un petit criminel de New York, avec beaucoup de dureté et d’ironie. Nous entendons dans la chanson le refrain « I like to be in America » qui fait référence au fabuleux et tragique film West Side Story. Il est devenu un classique de la musique salsa.
Il débute en parallèle une carrière d’acteur et quitte Willie Colon après 6 ans de collaboration pour monter son propre orchestre, orienté plus rock. Il reprend également ses études de droit dans les années 1980. Il se sent de plus en plus concerné par les questions de société et se présente même aux élections présidentielles du Panama en 1994. En 2000, il est nommé ambassadeur aux Nations Unies.
Ruben Blades a surpris beaucoup de monde cet hiver en obtenant son 5ème Latin Grammy award, mais pour un album de tango cette fois. Pourquoi s’être mis au tango ? Le projet avait commencé il y a une dizaine d’années mais il avait été interrompu du fait du peu de temps laissé par ses activités politiques. L’artiste trouve que ce registre musical est plus pertinent et plus fort que la salsa. La salsa serait plus une musique d’action, le tango plus de réflexion et d’émotion. Les instruments du tango évoquent la nostalgie, la tristesse, le regret.
L’album « Tangos » a été enregistré en collaboration avec le bandéoniste Leopoldo Federico. Il reprend quelques titres de son répertoire de salsa qu’il revisite en version tango, comme le célèbre « Pedro Navaja » ou encore « Pablo Pueblo » que voici :
